Discrimination

Toute décision de l’employeur (embauche, promotion, sanctions, mutation, licenciement, formation…) doit être prise en fonction de critères professionnels et non sur des considérations d’ordre personnel, fondées sur des éléments extérieurs au travail (sexe, religion, apparence physique, nationalité, vie privée…). A défaut, des sanctions civiles et pénales sont encourues.

Le texte des articles 225-1 à 225-4 du Code pénal relatifs aux discriminations prohibées et aux sanctions encourues est affiché dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche.

Qu’est-ce qu’une discrimination ?

Comme le précise la loi du 27 mai 2008 citée en référence :

  •  constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable ;
  •  constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs mentionnés ci-dessus, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés

La discrimination inclut :

  •  tout agissement lié à l’un des motifs mentionnés ci-dessus et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ;
  •  le fait d’enjoindre à quiconque d’adopter un comportement discriminatoire
  Quelles sont les personnes protégées ?

Tout salarié, tout candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise est protégé contre les discriminations au travail

Les salariés témoins ou ayant relaté des agissements discriminatoires ne peuvent pas non plus être sanctionnés, licenciés ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire

En outre, aucune décision défavorable à une personne ne peut être fondée sur sa soumission ou son refus de se soumettre à une discrimination prohibée

 

Quels sont les motifs de discriminations interdits ?

Opérer une distinction entre les salariés sur des motifs autres que les nécessités de l’emploi ou les qualités professionnelles du salarié constitue une discrimination prohibée par la loi

 

Sont particulièrement visées les discriminations fondées sur :

  •  l’origine,
  •  le sexe,
  •  les mœurs,
  •  l’orientation sexuelle,
  •  l’âge,
  •  la situation de famille ou la grossesse,
  •  l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race,
  •  les opinions politiques,
  •  les activités syndicales ou mutualistes,
  •  les convictions religieuses,
  •  l’apparence physique,
  •  le patronyme,
  •  l’état de santé ou le handicap

L’exercice normal du droit de grève ne saurait donner lieu de la part de l’employeur à des sanctions ou à des mesures discriminatoires en matière de rémunérations et d’avantages sociaux

Aucun de ces motifs ne peut donc être invoqué pour :

  •  écarter une personne d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise,
  •  sanctionner, licencier ou décider d’une mesure discriminatoire (directe ou indirecte, telle que définie par la loi du 27 mai 2008 citée en référence) contre un salarié, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat. La rémunération s’entend du salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et de tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier

Aucun de ces motifs ne peut non plus être avancé pour empêcher un salarié d’adhérer librement au syndicat professionnel de son choix. Est également interdite toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en matière d’affiliation et d’engagement dans une organisation syndicale ou professionnelle, y compris d’avantages procurés par elle

Toute discrimination directe ou indirecte (telle que définie ci-dessus) est également interdite en raison de la maternité, y compris du congé de maternité, ce principe ne faisant toutefois pas obstacle aux mesures prises en faveur des femmes pour ces mêmes motifs

Les mêmes dispositions protectrices s’appliquent aux personnes qui seraient écartées d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, ou aux salariés qui seraient sanctionnés ou licenciés ou feraient l’objet d’une mesure discriminatoire, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à leur employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives, de faits de corruption dont ils auraient eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions

  Quelles sont les différences de traitement admises ?

Les dispositions visées ci-dessus, relatives à l’interdiction des discriminations, ne font pas obstacle aux différences de traitement, lorsqu’elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et pour autant que l’objectif soit légitime et l’exigence proportionnée

 

L’âge

Les différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un but légitime, notamment par le souci de préserver la santé ou la sécurité des travailleurs, de favoriser leur insertion professionnelle, d’assurer leur emploi, leur reclassement ou leur indemnisation en cas de perte d’emploi, et lorsque les moyens de réaliser ce but sont nécessaires et appropriés

Ces différences peuvent notamment consister en :

  •  l’interdiction de l’accès à l’emploi ou la mise en place de conditions de travail spéciales en vue d’assurer la protection des jeunes et des travailleurs âgés ;
  •  la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite

La liste des travaux interdits aux salariés de moins de 18 ans, en raison du danger qu’ils présentent, est inscrite dans le Code du travail aux articles D. 4153-20 et suivants

D’autres travaux sont réglementés en raison de leur pénibilité (port de charges, emploi aux étalages extérieurs…)

 

L’état de santé ou le handicap

Les différences de traitement fondées sur l’inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l’état de santé ou du handicap du salarié ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectives, nécessaires et appropriées

Par ailleurs, afin de garantir le respect du principe d’égalité de traitement à l’égard des travailleurs handicapés, les employeurs doivent prendre, en fonction des besoins dans une situation concrète, les « mesures appropriées » pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l’exercer ou d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l’employeur

Ces « mesures appropriées », prises au profit des seules personnes handicapées et visant à favoriser l’égalité de traitement, ne constituent pas une discrimination : c’est au contraire le refus par l’employeur de les prendre qui serait constitutif d’une telle discrimination

 

Le sexe

En matière d’embauche, lorsque l’appartenance à l’un ou l’autre sexe détermine l’exercice d’un emploi ou d’une activité professionnelle, l’offre peut être expressément réservée à une femme ou à un homme

 

La protection contre le licenciement suite à une action en justice

Le licenciement est nul lorsqu’il est décidé par l’employeur en raison d’une action en justice engagée contre lui par le salarié concerné, une organisation ou une association le représentant

Le salarié bénéficie d’un droit à réintégration et est considéré comme n’ayant jamais cessé d’occuper son emploi

Le salarié peut refuser de reprendre son emploi : le conseil de prud’hommes lui accorde une indemnité au moins égale aux salaires des 6 derniers mois, en plus de l’indemnité de licenciement conventionnelle ou légale

  Quels sont les recours des victimes et témoins de discriminations ?

 

Recours pénal

La personne faisant l’objet d’une discrimination peut déposer plainte auprès du Procureur de la République, du commissariat de police, de la gendarmerie ou du doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance afin que les agissements dont elle est victime soient pénalement sanctionnés (par le Tribunal correctionnel)

 

Recours civil

Les salariés victimes ou témoins de discriminations disposent également d’un recours devant le conseil de prud’hommes

L’objectif du recours : faire annuler la mesure ou la décision fondée sur un motif discriminatoire et demander réparation du préjudice subi. Il appartient à la personne faisant l’objet d’une discrimination de présenter au juge les éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination, directe ou indirecte

Au vu de ces éléments, l’auteur supposé doit prouver au juge que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination. Le juge prend une décision après avoir ordonné toutes les mesures d’instructions qu’il estime utiles, en cas de besoin

L’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination se prescrit par 5 ans à compter de la révélation de la discrimination. Ce délai n’est pas susceptible d’aménagement conventionnel. Si la discrimination est reconnue, les dommages et intérêts devront réparer l’entier préjudice résultant de cette discrimination, pendant toute sa durée

 

 Qui peut intervenir en cas de discrimination

 

L’inspecteur du travail

Les inspecteurs du travail peuvent se faire communiquer tout document ou tout élément d’information, quel qu’en soit le support, utile à la constatation de faits susceptibles de permettre d’établir l’existence ou l’absence d’une méconnaissance des articles du Code du travail ou du Code pénal prohibant les discriminations

 

Les organisations syndicales

Les organisations syndicales représentatives au plan national ou dans l’entreprise peuvent exercer en justice toute action relative à des agissements discriminatoires, en faveur d’un salarié de l’entreprise ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en entreprise

Le syndicat doit notifier par écrit à l’intéressé son intention d’exercer l’action en justice. Il peut agir sans le mandat de l’intéressé, sous réserve que celui-ci ne s’y oppose pas dans un délai de 15 jours à compter de la date de la notification

L’intéressé est libre d’intervenir à l’instance engagée par le syndicat

 

Les associations de lutte contre les discriminations

Les associations de lutte contre les discriminations régulièrement constituées depuis au moins 5 ans peuvent exercer en justice toute action relative à des agissements discriminatoires, en faveur d’un salarié de l’entreprise ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en entreprise. Dans le cadre de la lutte contre les discriminations liées au handicap, l’action peut également être intentée, sous les mêmes conditions, par les associations oeuvrant dans le domaine du handicap

L’association doit pouvoir justifier d’un accord écrit de l’intéressé. Celui-ci est libre d’intervenir à l’instance engagée par l’association et d’y mettre un terme à tout moment

 

Les délégués du personnel

Les délégués du personnel disposent d’un droit d’alerte. En cas d’atteintes aux droits des personnes et aux libertés individuelles résultant de mesures discriminatoires en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement, ils peuvent saisir l’employeur qui doit procéder sans délai à une enquête et mettre fin à cette situation

Si l’employeur ne réagit pas à cette alerte, le référé prud’homal peut être saisi par la salarié concerné ou, avec son accord, par les délégués du personnel

 

La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE)

La HALDE est une autorité indépendante compétente pour connaître et lutter contre les discriminations, directes ou indirectes, interdites par la loi ou par une convention internationale à laquelle la France est partie. Elle peut être saisie par toute personne qui s’estime victime de discrimination ou se saisir d’office des cas de discrimination directe ou indirecte dont elle a connaissance, sous réserve que la victime, lorsqu’elle est identifiée, ait été avertie et qu’elle ne s’y soit pas opposée

Les agents de la HALDE assermentés et spécialement habilités par le procureur de la République peuvent constater par procès-verbal les délits de discrimination, notamment dans le cas où il est fait application des dispositions de l’article 225-3-1 du code pénal admettant comme mode de preuve de l’existence d’une discrimination la pratique des vérifications à l’improviste (ou « testing »)

Un service d’accueil téléphonique (08 1000 5000) répond aux demandes d’information et de conseil sur les discriminations et sur les conditions de saisine de la HALDE. Le cas échéant, il réoriente les appelants vers les autres organismes ou services compétents. L’affichage des coordonnées de ce service est obligatoire dans tous les établissements mentionnés à l’article L 3111-1 du code du travail ainsi que dans les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif

La HALDE intervient notamment pour aider les victimes à constituer leur dossier ; elle dispose pour cela d’un pouvoir d’investigation permettant de demander des explications, d’auditionner des personnes, de consulter des documents ou même dans certains cas de procéder à des vérifications sur place. Ces vérifications doivent en principe avoir lieu avec l’accord des personnes intéressées : toutefois, en cas d’opposition du responsable des lieux, le président de la HALDE peut saisir le juge des référés d’une demande motivée afin qu’il autorise ces vérifications, qui se déroulent alors sous l’autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées

Lorsqu’elle constate que des actes discriminatoires ont été commis dans l’activité professionnelle d’une personne physique ou morale soumise à agrément ou autorisation par une autorité publique, ou à l’encontre de laquelle une telle autorité dispose du pouvoir de prendre des mesures conservatoires ou des sanctions pour non-respect de la législation relative aux discriminations ou au titre de l’ordre et des libertés publics, la HALDE peut recommander à cette autorité publique de faire usage des pouvoirs de suspension ou de sanction dont elle dispose. La HALDE est tenue informée des suites apportées à sa recommandation. Dans le domaine de l’emploi, cette disposition serait, par exemple, susceptible de s’appliquer aux opérateurs privés offrant des services de placement sur le marché de travail qui n’auraient pas respecté la législation relative à la lutte contre les discriminations

La HALDE ne dispose pas d’un pouvoir de jugement, mais si les faits portés à sa connaissance lui semblent constitutifs d’un crime ou d’un délit, elle en informe le procureur de la République. Elle peut également être invitée, par les juridictions civiles, pénales ou administratives saisies de faits relatifs à des discriminations, à présenter ses observations, d’office ou à la demande des parties, ou demander à être entendue par ces juridictions, cette audition étant alors de droit

Avec l’accord des personnes en cause, la HALDE peut désigner un médiateur afin de parvenir à une résolution amiable des différends portés à sa connaissance

Elle peut également, dans les conditions précisées par l’article D 1-1 du code de procédure pénale, proposer à l’auteur des faits constitutifs d’une discrimination prohibée, une transaction consistant notamment dans le versement d’une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 € s’il s’agit d’une personne physique et 15 000 € s’il s’agit d’une personne morale et, s’il y a lieu, dans l’indemnisation de la victime. Si elle est acceptée par l’auteur des faits constitutifs de discrimination, cette transaction devra, pour produire effet, être homologuée par le procureur de la République

La personne qui saisit la HALDE doit lui faire connaître, par écrit, en apportant toutes précisions utiles, les faits qu’elle estime constitutifs d’une discrimination, directe ou indirecte. La haute autorité enregistre sans délai les réclamations dont elle est saisie et en informe par écrit l’auteur de la saisine. Le cas échéant, elle fait connaître à ce dernier que les faits invoqués n’entrent pas dans le champ de sa compétence ou que sa réclamation apparaît manifestement infondée. Dans le cas où elle engage le traitement de la réclamation, la HALDE informe à intervalles réguliers l’auteur de la saisine des démarches accomplies. Elle veille également à l’informer, le cas échéant, de l’existence de délais de prescription des actions en matière civile ou pénale et des recours contentieux devant la juridiction administrative

Les victimes de discrimination peuvent également saisir la HALDE par l’intermédiaire d’un député, d’un sénateur ou d’un représentant français au Parlement européen

Toute association régulièrement déclarée depuis au moins 5 ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre les discriminations ou d’assister les victimes de discrimination, pourra saisir la HALDE conjointement avec toute personne qui s’estime victime de discrimination et avec son accord

 

Quelles sont les sanctions prévues pour l’auteur de la discrimination ?

La personne reconnue coupable de discrimination encourt :

  •  une sanction disciplinaire, s’il s’agit d’un salarié de l’entreprise,
  •  des sanctions pénales (trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende)

Les personnes morales peuvent aussi être déclarées responsables pénalement d’actes de discriminations. Les peines encourues sont l’amende et l’interdiction d’activité